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Un autre regard sur le rail
18 octobre 2019

18 octobre 2019: du jamais vu !

Du jamais vu. Voila ce qui ressort de cette journée, loin d'être finie et potentiellement encore pleine de rebondissements. Car nous pensons ne pas avoir encore tout vu. Vous savez ? C'est comme dans la pub. "Et c'est pas fini" ! La team ARSLR est composée de "jeunes pousses", le "doyen" n'a que 12 ans d'ancienneté. Mais les plus anciens ou les anciens nous écrivent des mails pour nous dire qu'ils n'ont jamais vu une pareille situation à la SNCF si l'on remonte dans le temps. Nous nous basons sur l'ensemble des facteurs qui composent la crise sociale que la SNCF traverse aujourd'hui.

D'abord, c'est la première fois depuis le 6 octobre 2011 qu'autant de cheminots, si ce n'est même plus, exercent leur droit de retrait en même temps sur l'ensemble du territoire. Nous l'avons dit sur un post ce matin, la dernière fois, en national, c'était les ASCT suite à l'agression de Bernard Mortellier, victime d'une agression au couteau dans le train IC 4310 Lyon - Strasbourg. Pour ceux qui ont demandé des nouvelles, Bernard a pris sa retraite quelques mois après et son agresseur a été condamné à 12 ans de réclusion criminelle.

Ensuite, c'est la première fois qu'un tel accident se produit avec une circulation dépourvue d'un ASCT. Certes, les chocs sur les passages à niveau ne sont pas d'hier. Mais, comme nous l'avons expliqué dés hier soir, lors de cet accident, l'engin moteur, un BGC, a été fortement endommagé. L'agent de conduite, seule personne se trouvant à bord et à être habilité à assurer les procédures de sécurité, a été blessé aux jambes. Il a fait preuve d'un courage remarquable, sans doute par instinct de survie, pour aller couvrir l'obstacle représenté par sa rame engageant le gabarit suite à sa sortie des voies et les restes de la circulation routière engageant également le gabarit sur voie contiguë. Ce qui a permis d'éviter un sur accident avec un train croiseur, lequel aurait alors percuté non seulement les restes du véhicule routier mais en plus la rame déjà accidentée puisqu'elle engageait le gabarit.

Imaginez vous un seul instant que ses blessures aient été plus graves ? Qu'il n'ait pu sortir de la cabine ? En sachant que la RST était HS suite au choc. Quoi qu'en disent les médias (nous allons y revenir) ou les pseudos experts, citons Djebbari ou tout le cheptel de grands dirigeants de la boite, la présence d'un ASCT aurait garanti une boucle de sécurité supplémentaire. L'ADC n'étant pas en pleine possession de ses moyens, l'ASCT serait allé faire la couverture d'obstacle lui même. Sauf si ce dernier aurait été également blessé, dans ce cas nous n'aurions rien pu dire puisque toutes les mesures de sécurité auraient été prises par la direction pour limiter le risque d'accident.

Un train qui circule sans ASCT ou sans autre personne habilitée à exercer des missions, des procédures de sécurité est un train qui représente, en cas d'accident tel que celui d'hier, un danger. C'est du moins l'avis des collègues exerçant leur droit de retait. Et certains inspecteurs du travail abondent déjà en ce sens en validant le bien fondé des droits de retrait et constatent déjà des entraves à l'exercice du droit de retrait.

Ensuite, c'est la première fois, dans un tel contexte, que la communication de la direction de la SNCF dérape. Totalement. Ils ont littéralement pété un câble. Dés le petit matin, selon les régions, les astreintes informations voyageurs demandaient aux GIV et RIV d'afficher des messages conjoncturels tels que "grève surprise" ou "grève inopinée" Terme très amateur qui revient à littéralement se foutre de la tête des usagers ! Mais le drame est survenu vers 9h, quand la communication de crise a strictement imposé partout en France le terme glacial de "grève sans préavis" Du... jamais vu. Des GIV / RIV nous ont écrit en disant avoir eu honte, mal au coeur en étant obligé d'écrire ce message conjoncturel, de le diffuser. L'un nous a confié avoir refusé cet ordre et avoir obligé son supérieur à écrire lui même le message.

La direction accuse ouvertement des salariés, qui usent leur droit de retrait sur leur lieu de prise de service, qui sont en tenue, pour les ASCT, avec les outils de travail (clé de berne, clé deny, COSMO, SIRIUS, etc...) de faire grève de manière illégale. C'est grave. Sont ils prêts à assumer leur communication devant les tribunaux ? Qui sont ils pour se permettre de juger de l'illégitimité d'un exercice du droit de retrait sans passer devant un tribunal, et ce alors que des inspecteurs du travail donnent déjà raison aux cheminots sur certaines régions ? A Strasbourg, la DIRECCTE conseille directement aux OS de porter plainte contre la direction par rapport au terme "grève sans préavis" 

Le but de cette communication mensongère, ou du moins son effet, est de la faire reprendre officiellement par les médias, qui ont sauté sur l'occasion pour la répéter en boucle, pour formater l'esprit d'un maximum d'usagers, de Français. Le but ?  Engendrer un déchaînement quasiment sans précédent sur les réseaux sociaux. Nous vous épargnons ce que l'on a vu, lu, entendu car c'est horrible mais c'est du jamais vu ! Pire que pendant la grève de 2018. C'est limite si les cheminots ne devraient pas crever en silence. Et les usagers avec. Passons aussi sur les fameux grands experts Facebook, les experts 2.0 ou les experts du comptoir de bar. Et passons sur le fait que les dirigeants de la SNCF se prennent pour des juges des temps modernes. 

Les répercussions se font aussi ressentir sur le terrain avec un déchaînement d'usagers sur les agents d'escale et de vente, à qui nous avons rappelé qu'ils peuvent eux aussi exercer leur droit de retrait si ils se sentent menacés par la présence massive de personnes agressives. Cette communication met donc juridiquement en danger son auteur (nous savons de qui vient ce message), l'entreprise et les salariés n'exercant pas leur droit de retrait, à l'affront des usagers. Il mettra également les cheminots en danger ultérieurement. La direction ne serait-elle pas en train de préparer le terrain pour décembre ? 

Si ce terme n'a pas été choisi au hasard, c'est également parce que la direction ne veut pas franchement admettre qu'elle a eu tort sur l'EAS. Intéressons nous à un personnage: Frank Lacroix, DG TER SNCF. Il a tenu une conférence de presse et a affirmé à son tour "on est bien dans une grève qui se passe aujourd'hui sans préavis" Lui aussi met sa responsabilité en jeu. Mais dans le fond, c'est un homme qui a peur. Pourquoi ? Simplement parce que Frank Lacroix c'est le VRP officiel de l'EAS auprès des régions. Il vante les mérites de ce système de TER sans ASCT sécurité en argumentant sur des économies. En passant, nous aimerions bien avoir les chiffres officiels, et vérifiables, des économies réalisées avec l'EAS (et avec la fermeture de gares) L'EAS c'est son dada. Impossible pour lui d'admettre la réalité et d'imaginer ne serait-ce qu'une seule seconde un retour en arrière sur l'EAS ! 

Et nous rappellerons que les cheminots et, à l'époque, les CHSCT ont prévenu des risques de l'EAS sur la sécurité des circulations. La direction le sait. Et tente d'étouffer l'affaire car elle sait que sa responsabilité peut rapidement être engagée.

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